vendredi 14 juin 2019



21 8 19   Guilvinec

Cette fois, la barque bleue s'engage, pleine face, vers la rive.
La dame assez jeune qui attendait sur la dune avec son petit garçon, tous deux équipés d'un fin gilet de sauvetage, s'est approchée du bord et a embarqué.
Le son du moteur, aigu, de petite cylindrée, s'éteint progressivement jusqu'à ce que l'embarcation, devenue minuscule, se rapproche de la ligne d'horizon.
Un autre est remonté à pied en tirant sa dérive jusqu'à la dune.
Ils ont commenté l'intérieur du seau et devisé du prix de l'écoute achetée le matin même.





Il arrive que ce soit le côté sombre de la serviette, le bleu outremer foncé qui soit visible sur le sable. Mais comme pour les bons jours, je vais parfois lui préférer la face bleu-vert, très claire, ressemblant un peu à la couleur d'un lagon.
Mais celle rappelant le grand large ou le bleu profond sous grand vent n'est pas mal non plus.







17 8 19
Belle parenthèse dans le temps, hier, pour cette journée occupée à rallier Nantes et son aéroport.
Ce qui aurait du être une corvée s'est plutôt transformé en une diversion clairsemée d'imprévus avec les ralentissements que nous avons commenté et les quelques arrêts.
Trois heures dans l'aéroport presque exclusivement occupées devant la baie vitrée à observer le trafic des avions décollant et atterrissant. Nombreux commentaires avec les deux enfants sur toutes les charge partagées entre les petits bonhommes oranges au sol à l'approche de chaque nouveau départ.
L'intrigue aussi, le drame dans un avion qui a beaucoup tardé à repartir, les aller-retour des hôtesses puis de la police sur la passerelle d'embarcation. Les dialogues mouvementés entre les policiers et le personnel naviguant jusqu'à ce qu'un homme soit emmené hors de l'avion.
Et tout cela sans le son, comme une sorte de cinéma muet des temps modernes.







3 8 18
Comment ces outils de notation devraient devenir ce qui précède la fabrication d'un tableau.
Que leur incertitude, leur fragilité restent lisibles dans l'écriture plus aboutie que constitue la peinture.





30 7 19
Le voyage en auto mène directement à Mont-de-Marsan.
L'escale de deux jours me montre les rues aux maisons basses et blanches avec quelques arcades qui me rappellent l'architecture des arènes.




Ensuite vient la Lozère avec ses pentes louvoyantes entre les roches, ses coloris vert-cru ou jaune-paille.
La route vers le Vaucluse est une infinité de petits virages serrés. La Lozère généreuse se métamorphose en peu de temps en une Ardèche plus sèche.
Et les routes droites de la plaine franchissent ensuite le Rhône. Le désordre s'installe pour quelques dizaines de kilomètres puis tout s'embourgeoise après Vaison-la-Romaine.
Panoramas magnifiques en allant vers Buis.






7 7 19 
A un moment donné de sa vie, il a pris sa plume et noté les choses exécutées, mais quelles choses ? Car elles sont innombrables et on se heurte, lorsqu'il s'agit de noter les choses faites, à le même difficulté que de noter les choses observées, à savoir délibérer de ce qui doit être mis de côté, c'est à dire à peu près tout.
Lorsque j'avais souhaité noter à Rouen, en 80 et 81, tout ce qui se trouvait m'environner, je m'étais déjà heurté à ce soucis de l'infinité des espaces et des instants.
Il en va de même d'un journal davantage tourné vers ses propres actes et pourtant l'expérience m'a montré que la démarche était utile et qu'elle profitait abondamment à l'organisation du travail, une sorte de ressort pour l'inspiration.










Ils arrivent, peu de temps après que je sois sorti de la mer, et pourtant il est déjà tard.
J'aimerais qu'ils aient eu l'idée de plonger en me voyant nager.
La fille peut avoir entre douze et quinze ans, mince comme une tige, les cheveux bouclés et des lunettes à grosses montures vissées sur le nez. Elle porte un bikini rouge.
Les parents sont sereins. Toute la famille y a été direct, avec quelques commentaires cependant sur la nécessité de se mouiller un peu avant.
La lumière est devenu transparente depuis un bon moment ; il pourrait bientôt être 21h.




29 6 19
Il a fallu vider la grande malle en tôle avant d'envisager de la transporter...
Sortir tous ces grands et moins grands blocs de dessins de mes débuts à Paris, dans les années 80. Mettre à jour les maladresses de ces dessins, des centaines de croquis s'agrandissant jusqu'au format raisin... ceux-ci relatant ma vie d'alors, les nus ennuyeux attrapés lors d'incursions clandestines dans les beaux-arts de Paris, les plus sympathiques portraits de copines et toutes ces tentatives de paysages dans Paris, avec ponts et jardins...








23 6 19 Buis
L'homme a son petit pendule suspendu au dessus de son journal.
Il en change aussi, pour un plus compact qu'il fait bouger dans un mouvement circulaire, au bas de sa fine chaîne.
Son apparence, sa position me rappellent "l'homme à la pierre Kalako", gravure que j'ai faite, il y a une quinzaine d'années, d'après un des passages de La Tentation de Flaubert.


2003  La pierre Kalako  Gravure




21 3 19
La nuit, au retour d'Asnières, apporte à maintes reprises sa dose de mystères, les troncs jaunis par les réverbères, les canards endormis sur les toits des péniches ... et jusqu'au quai du métro "Pont de Levallois", totalement vide et presque éteint.

3 1 19
Mink Snopes, le criminel du livre de Faulkner "Le hameau", vit un calvaire solitaire de plusieurs jours pour tenter d'échapper à la réalité de son crime et à ses poursuivants. Cela finit par sa capture suivie d'une violente tentative d'évasion.
Au soir de cette journée d'horreur, le cabriolet qui l'emmène arrive à Jefferson et voici ce qu'écrit l'auteur :
"Des hommes, revenant chez eux de leur travail, entraient par de jolies portes fraîchement peintes, et allaient vers des assiettes de nourriture et des tasses de café, dans le long crépuscule naissant."

4 1 19
... et de sa cellule, Minc aperçoit un groupe de prisonniers noirs que l'on emmène vers les cuisines :
"Est-ce qu'ils vont donner à manger à ces nègres avant d'en donner à un blanc ?" se demande-t-il en respirant l'odeur du café et du jambon.




Snopes : le hameau






Snopes : le hameau (pages 333-334)





Snopes : le hameau (pages 337-339)


Dans le grand silence du trajet de la ligne 9, au petit matin, quelques voix marmonnent des langues orientales qui pourtant portent fort comme une incantation...